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~ Only God can judge me ~ [Terminé]

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Shura Kiryll

Cold-Blooded Hunter

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Shura Kiryll
Cold-Blooded Hunter
Message Sujet: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 28 Déc - 17:49

~ Only God can judge me ~ [Terminé] Tumblr_inline_muohdcUnAW1rb4iie ~ Only God can judge me ~ [Terminé] Tumblr_inline_muohel57sp1rb4iie
~ Only God can judge me ~

Un vent froid soufflait de part et d'autres de la zone, soulevant mes cheveux et me frigorifiant de la tête aux pieds. Emmitouflée dans un long manteau de laine noire, figée dans une bourrasque d'air glacial. Un frisson remonta le long de mon échine, engendrant  la chair de poule sur ma peau. Le frais glaçant me mordit les joues, asséchant rapidement mes lèvres. Les humecter ne servirait à rien à part les déshydrater encore plus. Dans un léger soupir, j'allais avancer quand une terrible rafale m'attaqua de côté, me forçant à me décaler de plusieurs pas pour éviter de tomber. Deux souffles d'air plus tard, je me retrouvai sur les genoux, luttant pour me relever. Je finis par me remettre debout et par enfiler ma capuche pour contrer le vent de mon visage. Mes gants empêchaient mes mains de congeler, me permettant de les garder hors de mes poches. C'était plus sûr. J'attendis quelques minutes que le vent se calme un peu pour sortir mon visage de la protection offerte par ma capuche et mon écharpe. Levant les yeux sur l'immeuble devant moi, je le détaillai rapidement.
Haut de plusieurs étages, le bâtiment n'était plus qu’obsolète. La moitié s'était effondrée au sol, se réduisant en poussières tout autour de la base. Plus aucune vitre ne comblait les trous des murs ; quant aux portes, soit elles avaient disparu, soit elles se balançaient sur une charnière, luttant pour rester accrochées. La peinture écaillée me semblait malade, si sale et à l'odeur nauséabonde. De la cendre et des débris voletaient dans l'air, donnant une allure plus que lugubre à l'endroit, pas très accueillant à la base. Le sol autour de l'édifice était tout aussi sale, craquelé et, avec la neige tombée quelques jours auparavant, n'offrait aucun appui. Des relents de pourriture me parvenaient et, si le froid ne m'avait pas engourdi les sens, m'auraient donné envie de vomir. Aucune âme qui vive à première vue, mais je restais sur mes gardes. Même les rats n'avaient pas l'air de venir par ici.
Cela faisait plusieurs mois maintenant que je n'étais plus allée aussi loin des autres de mon groupe. Mon chef refusait catégoriquement toute sortie sauf cas d'extrême nécessité et je n'avais pas vu le monde extérieur depuis belle lurette. Il faut l'avouer, ça ne m'avait guère ennuyée, j'avais trouvé diverses occupations pour faire travailler mon esprit tout autant que mon corps. Seulement, reprendre du service après tant de temps et de changement n'était pas si facile, surtout pour une première mission en solo. Je devais me remettre en piste, me contrôler et faire ce pourquoi je faisais partie des Hunter.
Je commençais mes recherches ici. Personne n'osait affronter cet édifice funeste et glauque qui avait changé la vie de centaines voire de milliers de personnes. Certains racontaient que quiconque venait ici repartait Mutant ; d'autres que ceux assez fous pour venir n'en ressortaient jamais. Personnellement, je pensais que la peur des hommes envers ce lieu dominait leur logique et les empêchait de réfléchir correctement. Certes, il aurait très bien rester des ondes ou des relents de la catastrophe qui s'était abattue sur la ville ; mais, avec le temps qui était passé depuis, s'il y avait eu un jour des flux, ils seraient trop faibles pour affluer sur quoi que ce soit. Je n'étais pas une professionnelle en ce qui s'était passé ce jour-là, mais une logique s'imposait : si les rumeurs étaient parvenues aux oreilles des Mutants, ceux-ci iraient se cacher en ce lieu. Les Hunters se respectant un tant soit peu ne viendraient pas ici, même les recrues mutantes, de peur de représailles. Qui voudrait être pourchassé plus qu'il ne l'était déjà ?
En silence, je resserrai les pans de mon manteau avant d'avancer vers l'entrée du bâtiment. Le vent semblait s'être calmé pour le moment, mais je ne doutais pas un seul instant que ce n'était qu'une trêve de quelques minutes, le temps de laisser le froid s'installer plus encore. J'approchai de ce qu'il restait de la porte, tout en restant sur mes gardes. Je ne savais pas exactement ce qui pouvait se trouver à l'intérieur, des animaux, des humains sans abri ou encore des Mutants. Mes pas crissaient sur la neige malgré mon envie de rester discrète, et chacun d'entre eux me paraissait lourd et lent. Lorsqu'enfin j'arrivai au squelette de la porte, je collai mon corps au mur, tendant l'oreille. Ne percevant aucun bruit, je penchai la tête et lançai un regard à la ronde.
Je me trouvais dans l'ancien rez-de-chaussée du bâtiment. Tout n'était plus que poussières et débris, les murs aussi sales que la neige dehors. Les pilonnes semblaient en mauvais état et ne plus soutenir grand chose. Un instant, j'évaluai la possibilité que l'immeuble ne tienne plus le choc et s'effondre, mais les chances étaient rares qu'il s'effondre aujourd'hui-même, au moment où j'avais choisi de venir. Ne voyant personne aux alentours, je fis un pas à l'intérieur. Les lieux avaient été vidés ; par qui, je n'en savais rien, mais le manque de meubles n'arrangeait pas l'obscurité crasse à laquelle j'avais affaire. J'avançais toujours, faisant en sorte de poser mes pieds le plus doucement et le plus silencieusement possible au sol afin de ne pas me faire remarquer si quelqu'un habitait réellement ici. Alors j'accédais aux escaliers, qui n'avaient pas l'air en bon état non plus, j'entendis un bruit se répercuter sur les murs. Je ne pus définir d'où venait exactement le bruit à cause de l'écho, et je m'accroupis aux pieds des escaliers, accolée au mur derrière moi. J'étais en vue et pas très discrète, noire sur gris sale, mais je ne pouvais pas bouger sans savoir d'où, de qui - ou de quoi - venait le grabuge.


Dernière édition par Shura Kiryll le Dim 28 Déc - 22:08, édité 1 fois
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Eryn Blake

Mutation Sensor

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Eryn Blake
Mutation Sensor
Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 28 Déc - 19:58

Assise, adossée contre un mur décrépi, Eryn écoutait les mugissements du vent.

La neige avait cessé, le temps s’était radoucit.
Mais un funeste vent glacé balayait inlassablement San Francisco, forçant les plus faibles à s’incliner sous son joug. Quelques édifices rendus trop fragiles par l’abandon achevèrent leur course vers la décrépitude, pliant sous les assauts des éléments. C’était tout particulièrement le cas des maisons coquettes. Des véhicules abandonnés depuis la catastrophe ainsi que des débris, aussi, terminaient leur périple avec cette touche finale ; ils dévalaient les rues vallonnées, poussés par les vents furieux, pour échouer finalement sur les docs ou dans la ville basse.

Avec sa blessure qui cicatrisait depuis plusieurs semaines déjà, Eryn avait décidé de se trouver une planque plus durable. Elle avait misé sur la zone de l’incident. Les Hunters étaient au repos depuis le début de l’hiver, Drake Carter s’appliquant à préserver ses forces. Les Peacekeepers et les agents de terrain de la Neo Corp. se devaient de rester sains à tout prix. Au pire, elle pouvait croiser quelques scientifiques, des curieux ou des tarés. Seule la dernière catégorie était à même de l’inquiéter.

Il avait fallu faire des réserves conséquentes, allant ainsi contre sa nature nomade. Elle priait vraiment pour que Harper n’eût rien dit de leur rencontre, de sa blessure. Autrement, la chasse serait ouverte.
Chaque jour, cette même crainte lui nouait les tripes : faire face à nouveau à un membre de son unité. À un de ses frères d’armes. Ou pire encore : à Carter. Elle sentait la solitude étioler peu à peu sa combattivité, et son désir de sortir Aria de ce merdier laissait miroiter, parfois, l’efficacité promise de la stratégie du Lieutenant Carter. Si on éradiquait les mutants, plus besoin de quarantaine, non ? C’était si simple…

Et dans ces instants de faiblesse, l’adorable visage de Sasha s’imposait alors à elle. Tuer de sang-froid une gamine ? Même avec toutes les horreurs qu’elle avait vues et subies dans son existence de soldat, elle ne pouvait se rabaisser à de telles atrocités.

Non, définitivement non.
Il fallait découvrir l’origine des mutations, la source du problème. Il fallait commencer par épurer San Francisco des responsables, pour avoir toutes les données permettant une possible guérison. Et ensuite, seulement, contacter l’extérieur et libérer tout le monde de la quarantaine serait possible.

C’était là un plan trop peu fiable ; Eryn reléguait ce monceau d’information à de la pacotille. Avancer, avancer à tout prix, c’était sa seule solution, la seule clé de la survie. Après tout, elle avait été entraîné pour cela : survivre et accomplir sa mission pour son pays. Une plaisanterie bien sinistre, compte tenu de la situation.

Le claquement de la bâche giflée par le vent fit sursauter Eryn.
Elle se releva, retenant une grimace alors que sa blessure la faisait souffrir. À contrecœur, elle se munit de sa béquille de fortune pour ménager sa jambe, et parcourut laborieusement les quelques pas qui la séparaient de la fenêtre pour refixer la bâche.

Des éclats de verre crissaient sous ses rangers. Située au troisième étage, son poste lui permettait d’avoir une vue décente sur les environs immédiats, notamment une bonne partie du Lake Merced Park, couvert par la neige. Parfois, elle s’attardait près de la fenêtre, quand bien même était-ce peu prudent : elle guettait la vie au-dehors, les quelques aventureux personnages qui arpentaient cette partie désertée de la ville. D’autres, elle se saisissait carrément de jumelles pour guetter l’approche d’un potentiel danger.

Quand un éclat rouge se détacha brièvement dans le paysage enneigé, Eryn se figea.
Rouge, rouge, ce n’était pas une couleur si courante, surtout que ce n’était pas le genre de vêtement que les gens portaient dans la Seamy. Bien trop voyants, une cible trop facile. Il fallait être désespéré, abruti ou particulièrement confiant pour arborer ce genre de couleur. Drake se fâcherait bien si un membre de son équipe se targuait de porter cette couleur et Eryn manqua de sourire lorsqu’elle se rappela l’air exaspéré qu’il avait arboré quand, prenant la défense d’une nouvelle recrue, elle lui avait exposé l’avantage d’une telle couleur de cheveux. Vraiment, qui pourrait penser qu’une jeune femme avec un look aussi excentrique pouvait faire partie des Hunters ?

Si le souvenir avait quelque chose de nostalgique et d’amusant, ce fut une panique bien vite contrôlée qui s’empara d’elle. Et si… S’il s’agissait réellement de Shura ? Elle s’empara des jumelles – cadeau de Dawn et son pack de survie – et scruta les environs, jusqu’à trouver la silhouette qui luttait contre les rafales de vent.

Merde, merde et merde.

D’un rapide calcul, elle réalisa qu’elle ne pouvait pas avoir déserté les lieux sans que la jeune chasseresse n’atteignît le bâtiment. Eryn remballa néanmoins ses affaires à la hâte ; son pragmatisme aigu rendait la tâche particulièrement aisée, les affaires déjà regroupées, tout rangé à l’exception du strict nécessaire. Elle sangla bien vite le tout sur son dos et s’apprêta à partir. Un dernier regard derrière lui indiqua qu’il serait impossible d’effacer toute trace de son passage : la marque du réchaud sur le sol, le manque de poussière là où elle avait foulé les lieux… Couvrir ses traces n’était pas impossible, mais futile : tout œil entraîné saurait reconnaître la manœuvre.

Un soupir plus tard, Eryn s’engageait dans les escaliers.
Sa jambe protesta, mais tint bon. Établir un rythme soutenu pour sa fuite serait particulièrement stupide, et Eryn n’était pas du genre à surestimer ses capacités. Elle plongea dans l’obscurité du bâtiment, trouva un endroit d’où elle pourrait surveiller l’entrée sans être vue. Son revolver, toujours ce fidèle Beretta au poids rassurant qui avait tant fait rire ses coéquipiers fut un temps, vint trouver sa paume.

L’état alerte d’Eryn se para d’une aura plus sereine alors qu’elle s’efforçait de mesurer son souffle et d’aiguiser ses sens. Elle n’eut pas à guetter bien longtemps avant de voir la jeune femme à l’entrée.

Casse-toi, il n’y a rien à voir ici…, songea-t-elle.

Sa prière muette ne fut guère entendue.
Eryn modifia légèrement sa position pour soulager sa jambe blessée, chose qu’elle n’aurait jamais fait en temps normal. Elle heurta une canette qui tomba, roula.
Eryn jura mentalement.

Une pointe de satisfaction perça la barrière qu’elle mettait entre elle et ses sentiments dans ce genre de situation. Shura s’était astucieusement mise à l’abri dès que le son avait retenti. Ayant pris part à sa formation, Eryn ne pouvait que se réjouir de son travail… Et pourtant. Elle se souvenait pas de Shura comme elle se souvenait des membres de l’unité. Étrange, la gamine semblait complètement imperméable à tout sentiment si ce n’était cette dévotion totale à l’égard de leur chef.

Rester terrée n’était pas une option, la confrontation directe non plus. Eryn opta pour le bluff. D’une voix haute et claire, sans trahir aucun sentiment, elle lança :

« Shura, tu es actuellement dans la ligne de mire de mon fusil. Si tu bouges, je tire, compris ? »

Eryn espérait ainsi gagner du temps, et prendre la température. Malgré elle, elle se répugnait à l’idée de devoir blesser Shura pour pouvoir s’en tirer. Si cette dernière la reconnaissait et acceptait de négocier…

Mais elle en doutait fortement.
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Shura Kiryll

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Shura Kiryll
Cold-Blooded Hunter
Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 28 Déc - 21:43

Un certain silence avait empli la grande pièce après ce bruit suspect. Toujours accroupie, une main au sol pour l'équilibre, la seconde sur ma cuisse parce qu'il fallait bien la poser quelque part, j'examinai chaque recoin visible sans pour autant remarquer qui que ce soit. Le froid m'avait quelque peu déstabilisée, de part son attaque plus mordante que dans mon souvenir. Mon corps et mon esprit s'évertuaient à réchauffer les parties de moi qui ne répondaient plus. Je devais réfléchir et remettre mon cerveau en course si je ne voulais pas mal finir. Ignorant mes mains congelées à travers mes gants, mon nez et mes joues rougis, je me concentrai. Les muscles bandés, prête à réagir, j'analysai le terrain.
A première vue, rien n'avait bougé. Tout était comme ça devrait être dans un bâtiment abandonné durant un hiver : froid, sale, humide et puant. Des courants d'air faisaient voler la poussière et, s'il y avait eu des empreintes au sol, elles auraient rapidement disparues, recouvertes par de la neige ou de la saleté, encore et toujours. A part ces débris en tout genre et tout ce que je viens de citer, je ne percevais rien d'autre. Aucun bruit à part le souffle du vent, aucune respiration autre que la mienne - qui était, soit dit en passant, totalement silencieuse. Je ne voyais rien qui aurait pu me surprendre ou me donner un indice, alors que si quelqu'un avait réellement été là, il y aurait eu une preuve de son passage. Sauf si cette personne avait eu un entraînement spécial. En règle générale, les hommes ne savaient pas cacher leur présence, y compris lors de traque. Les Mutants apprenaient peu à peu, mais faisaient toujours une petite erreur qui leur causait du tort. Ici, rien.
Je sursautai presque - presque - en entendant mon prénom, prononcé d'une voix claire et calme. Contrairement à quelqu'un qui aurait paniqué à l'idée d'avoir un chasseur dans les parages, cette personne - qui était une femme - arrivait à contrôler ses émotions pour ne pas se faire dominer par sa peur, ou tout autre sentiment nuisible au rationnel. Je mis la tête de côté, essayant de deviner d'où venait la voix, en vain. L'écho du lieu vide ne permettait pas de situer la femme. La... renégate.
Parce que j'avais bien reconnu cette voix. Qui, pouvant bien me connaître, était susceptible de me menacer d'une arme tout en gardant un ton calme et contrôlé ? J'avais vécu pendant plusieurs années ici et j'avais fait en sorte de ne pas avoir d'ennemi voulant ma mort. Je ne connaissais personne capable d'un tel prodige, de ne laisser aucun indice jusqu'à me tenir en joue. Puis, où pouvait-elle bien être ? Je lançai un énième regard autour de moi, sans rien déceler d'autre que de la poussière. Il y avait deux possibilités : soit elle s'était bien cachée au point d'être invisible à mes yeux, soit elle bluffait. La réaction la plus logique serait d'obéir en essayant d'inverser les dominances.

- De ce que je me souviens, c'est un Beretta que tu utilises. Et il ne s'agit pas d'un fusil. A moins que tu aies changé entre deux ?

Ma voix froide et insensible représentait bien mon état d'esprit. Eryn avait quitté nos rangs peu de temps après mon arrivée. Je n'avais pas eu le temps de la connaître mais elle avait été mon mentor pendant quelques temps, avant qu'elle ne devienne Mutante. Après, elle avait été utilisée dans notre sens et je n'avais plus eu l'occasion de la revoir ni de lui parler. Sa réaction de partir après deux mois d'activité avait été illogique et erronée ; pourquoi fuir alors qu'elle faisait partie des nôtres ? Elle savait alors ce qui se passait et n'aurait pas dû nous fausser compagnie comme elle l'avait fait. Les lâches comme elle, durant les guerres, avaient été abattus. Méritait-elle la même chose ? Je ne pensais pas. Le cœur a ses raisons que la logique n'a pas, et la peur avait dû prendre le contrôle total de son esprit et de son corps.
Malgré tout, sa désertion avait grandement ébranlé les rangs et semé le doute dans une minorité. Tout en me levant doucement, mains levées, je me souvins de son visage, de ses expressions. Je la connaissais trop peu pour prévoir ses gestes et réactions, et ce type de situations m'arrivait de plus en plus.
Une fois debout, constatant qu'aucune balle ne m'avait traversée de part en part, j'en déduisis que j'étais toujours vivante. Me tournant sur moi-même, j'évaluai toutes les possibilités pour en finir à une seule : elle bluffait. Aucun maquillage ou abri ne pouvait cacher une femme brune avec un Beretta dans les mains, si seulement elle le possédait encore. Je baissai les bras, comprenant que rien ne pourrait m'arriver tant que je restais immobile, aussi inoffensive qu'un mort.

- Je ne suis pas là pour te faire du mal, Eryn. Si nous parlions ? Nous n'avons pas eu l'occasion de parler depuis ta fuite.

Je n'avais fait aucun bruit en me relevant, aucune chance pour elle de m'avoir entendue me relever, et je n'avais guère l'intention de bouger. De là où je me trouvais, un mur dans le dos, les escaliers à ma droite, et la salle en face de moi, j'avais une vue parfaite sur la pièce ainsi qu'un échappatoire s'il le fallait - et si j'étais assez rapide. J'espérais juste ne pas en avoir besoin. Je ne m'étais armée que du strict minimum, un léger Glock sans cartouche de rechanges, ainsi que le complément Chasseur. Je ne pensais réellement pas rencontrer quelqu'un durant ma première mission en solo.
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Eryn Blake

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Eryn Blake
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Lun 29 Déc - 10:44

Shura l’avait donc reconnue.
Un frisson parcourut l’échine d’Eryn, et ce en dépit de tout le self-control dont elle pouvait faire preuve. Être confronté aux siens, ceux-là même qu’elle avait déserté… Cela créait toujours un malaise en elle, cette sensation d’égarement, ces doutes qui vrillaient son âme et imprégnaient inéluctablement ses os. Elle s’imposa une longue exhalation pour reprendre contrôle d’elle-même. C’était bien triste à dire, mais ce n’était que Shura, recrue qu’elle avait à peine formé, outil que Drake Carter allait jeter, elle le savait, une fois sa mission accomplie. Elle qui vouait une telle fidélité au leader des Hunters… Et pourtant, elle ne faisait pas partie de cette équipe soudée désormais réduite, cette famille qui avait perdu tant de membres au fil des armées, cette unité des forces spéciales qui avait subi des années d’entraînement et encore plus d’horreurs.

Affronter Shura était risible, comparé à une confrontation avec ceux qu’elle avait appris à aimer.

« Je ne t’ai jamais appris à te limiter à une seule arme. »

La réplique avait quelque chose d’amer. Shura se souvenait de ce genre de détails. La connaissait-elle assez pour pouvoir lire en elle ? Elle espérait que non. Néanmoins, cela signifiait que son coup de bluff lui avait gagné moins de temps que prévu. Hé, tout le monde n’était pas aussi crédule qu’Anderson Dawn quand on mentionnait Aria Blake. Peut-être même que Drake Carter avait réduit la quantité de munitions et d’armes à disposition les Hunters, peut-être plus encore pour les mutants de son équipe. Après tout, la pénurie touchait tout le monde, et le nombre de contaminés augmentait sans cesse.
Si Eryn n’osait pas en user, ses maigres réserves étaient plus qu’honorables, grâce aux bons soins d’Anderson et à la participation d’Aria : des munitions pour son Beretta, son couteau de combat, une paire de grenades, une bombe lacrymogène, constituaient, entre autres, son arsenal.

Shura aurait probablement compris qu’elle ne risquait rien dès l’instant où elle aurait osé se redresser. Si Eryn avait vraiment été en possession d’un fusil, elle lui aurait déjà tiré une balle dans la jambe pour marquer sa supériorité et réduire la mobilité de son éventuelle poursuivante. Rien de tel n’arriva.
Mais elle avait encore un avantage comparé à Shura. Elle savait où cette dernière s’était mise à couvert, tandis que la Hunter ignorait la position de sa proie. Hélas, cela ne demeurait un avantage que lorsqu’on avait l’intention de tuer. Et un tir à cette distance, dans l’obscurité n’était pas nécessairement impossible, mais du premier coup ? Non. Cela résulterait en gâchis de précieuses munitions. Il lui fallait s’en tirer autrement.

Prudemment, Eryn se redressa, arme braquée sur sa cible dont la chevelure se détachait si aisément dans l’obscurité. Que Drake eût laissé un de ses soldats avec une telle coloration prouvait bien combien il estimait la vie de ses mutants. De la chair à canon.

De la chair à canon qui pouvait se targuer de foutre Eryn Blake dans le pétrin.

« Depuis sa fuite. »
Si cela avait été dans sa nature, peut être que le choix de mot aurait frappé Eryn. Elle préférait qualifier cela de départ. Et pourtant. Il s’agissait bel et bien d’une fuite, incapable de supporter son travail plus longtemps, incapable de tuer des innocents victimes de la catastrophe. Incapable, somme toute, de s’en prendre à des semblables, d’user de sa propre mutation pour montrer du doigt les infectés et les exécuter. Pendant un moment, elle avait envisagé de mentir à Carter, de ne lui désigner que les mutants les plus dangereux. Puis, d’un regard échangé avec son supérieur, elle savait qu’elle était incapable de lui mentir, qu’il le verrait. Il la connaissait trop bien. Elle s’en serait mordu les doigts. Partir – fuir – avait été sa seule solution.

« Et de quoi veux-tu parler ? »

Si Shura pivotait un peu, elle pourrait désormais voir Eryn, plus haut, qui braquait son arme sur elle. L’ex membre des forces spéciales était, après tout, beaucoup plus entraînée qu’elle et si Shura faisait mine de saisir son arme, elle n’hésiterait pas à ouvrir le feu.

Eryn n’était pas quelqu’un de particulièrement loquace. La solitude avait probablement empiré ce trait de caractère chez elle. Et puis, du temps de l’unité de Carter, ils n’avaient jamais besoin de parler pour se comprendre. Équipe bien trop rodée, ils ne formaient qu’un, et un simple geste, un simple regard suffisait. Oh, ils desserraient les dents, parfois, pour se balancer des vannes ou s’insulter copieusement. Et encore. Ce dernier poing ne durait jamais bien longtemps, ils en venaient souvent aux poings plutôt que de gaspiller leur salive.

Allons, fais ton offre, Shura.
L’air dur d’Eryn reflétait sa détermination. Elle faisait partie de ces gens qui étaient prêts à tout pour survivre. De l’espèce de ceux qui avaient tué à maintes reprises. Suivi les ordres sans broncher. Et si elle devrait choisir entre sa vie et celle d’une gamine sans attache, sans famille, sans rien, la réponse se ferait évidence dans son esprit. Au moment fatidique, ce serait le visage d’Aria qui s’imposerait à elle. Elle n’avait pas le droit de mourir. Et plutôt mourir que retourner parmi les Hunters.

Quels étaient les ordres de Drake Carter à son sujet ?
Toujours les mêmes, aux dernières nouvelles. La ramener vivante à la base, où elle serait jugée.


Dernière édition par Eryn Blake le Ven 9 Jan - 17:44, édité 1 fois
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Shura Kiryll

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Shura Kiryll
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Lun 29 Déc - 16:25

Une seule arme. En effet, la possibilité qu'Eryn possède d'autres calibre ne m'avait guère effleuré l'esprit, je devais bien l'avouer. Si j'avais eu la capacité de ressentir des émotions, l'agacement aurait pris le pas sur mon contrôle et m'aurait fait commettre l'erreur de claquer la langue contre mon palais, bruit identifiable à plusieurs mètres à la ronde. J'aurais également froncé les sourcils et raidis les épaules, signe manifeste de l'irritation. Certaines personnes grognent même quand elles sont vraiment contrariées ; pour ma part, je ne fis rien de tout cela. Au contraire, je pris note de ce petit détail, qui pourrait très bien me servir plus tard. Si Eryn bénéficiait réellement de plusieurs armes - ce qui pouvait très bien être le cas -, j'avais intérêt à ne pas avaler de travers. Le moindre mouvement suspect pouvait m'être fatal.

Pression.

La voix de l'ancienne chasseuse retentit une seconde fois, réduisant mon champ de recherche. L'écho m'ennuyait toujours, mais me donnait un précieux indice dans un deuxième temps. Le son ne pouvait se répéter de là où il venait, il s'agissait d'un effet de résonance très spécifique à l'endroit où cela se produisait. Je pouvais donc affirmer que mon adversaire ne se trouvait pas si éloignée de moi que je le pensais en premier lieu, mais n'était pas non plus dans les trois ou quatre mètres m'entourant. La seule chose qu'il me fallait à présent, c'était son emplacement exact. Ainsi, nous serions ex æquo. Sauf si elle me réservait une petite surprise de son cru.

Pas vraiment intéressée par mon essai de conversation, Eryn semblait plus prompte à me tirer dessus qu'à bavarder. Essayer de la raisonner ne fonctionnerait guère, elle savait comment procédaient les Chasseurs. Il fallait que je trouve un moyen de comprendre cette femme et d'anticiper ce qu'elle allait faire. Aucune chance de réussite pour le moment. J'avais besoin de plus d'informations. La solution la plus logique serait de mentir en simulant une possible désertion de ma part. Après quelques secondes d'analyse, ce plan tomba à l'eau : la convaincre prendrait trop de temps, et la probabilité qu'elle me croit était pitoyablement faible. Ma capacité à étouffer sa méfiance n'était pas encore née. Encore une fois, je n'avais pas assez les cartes en main pour tenter quoi que ce soit de dangereux. Je n'étais pas suicidaire.

Des fourmis se défoulèrent dans ma jambe gauche, mais je n'y réagis pas. Je sentais le regard d'Eryn sur moi, un picotement léger témoignant de son angle de vue. « Qui voit est vu » ; si elle était en mesure de m'observer, alors je le pouvais aussi. Restant immobile, je lançai un énième regard autour de moi, toujours sans succès. Puis, ma jambe engluée de fourmis s'affaiblit, me contraignant à m'appuyer en peu plus sur mon autre jambe. Je bandai les muscles pour cacher mon mouvement, ainsi que pour réveiller mon mollet. Ayant dévié de quelques centimètres, j'eus un nouveau point de vue sur la salle que je n'avais pas encore exploité. Et là, je la vis.

Jugée légèrement plus haut que moi, la première chose que je remarquais était son Beretta pointé droit sur moi. Si seulement il avait eu une petite lumière rouge, j'aurais été prévenue plus tôt du danger. Ensuite, je pouvais discerner ses cheveux bruns presque noirs, plaqués autour d'un visage pâle et inquiétant. Un air déterminé inscrit sur les traits, Eryn semblait prête à commettre n'importe quel méfait pourvu qu'elle survive. Dans son cas, ainsi pourchassée comme un animal, j'aurais eu exactement la même réaction, et ne pouvais la mettre en porte-à-faux. Mais elle paraissait si sale et mal en point que je me posai un instant des questions sur sa capacité à survivre encore bien longtemps. Mais juste un instant. Ne jamais sous-estimer l'adversaire. Jamais.

- Très bien. Je te propose un marché.

Je n'avais pas l'intention de négocier. Négocier signifiait discuter avec une personne pour définir les termes du contrat. Cela signifiait perdre du terrain pour la confiance de l'autre. Perdre un avantage en faveur de l'ennemi. Et je ne l'acceptais pas. J'étais déjà dans une position nuisible face à une arme qui pouvait me trouer la peau avant même que je ne décide d'ordonner à mon cerveau de faire bouger mon corps. Je n'allais pas en plus perdre la seule chose pouvant m'éviter une blessure ou même la mort. Même si je pensais qu'Eryn ne me tuerait pas sauf si je ne lui laissais pas le choix.

Ici, je comptais mettre les frontières moi-même et décider des avantages et inconvénients pour l'une et l'autre. Qu'elle l'accepte ou non était ma seule préoccupation. Je ne voulais pas la laisser fuir. Pouvoir lui parler était un bénéfice dont je comptais bien profiter.

- Parlons juste. Je n'essaierai pas de te retenir, de te ramener chez les autres ou que-sais-je encore. (Mensonge) Je ne rapporterai même pas cette rencontre au chef. (Peut-être, peut-être pas) Je veux juste connaître les raisons de ton départ. Pourquoi tu es partie. (Vérité)

J'espérais vraiment qu'elle me parlerait. Savoir pourquoi elle s'était enfuie alors qu'elle faisait partie du groupe depuis longtemps. Non pas que je comptais trahir Carter, mais comprendre ses raisons m'aideraient sûrement si un jour je me trouvais dans sa situation. Il fallait anticiper. C'était la clé de la réussite. Même si notre chef avait toute ma loyauté, la vie m'avait assez montré que tout pouvait changer du jour au lendemain.
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Eryn Blake

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Eryn Blake
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Lun 29 Déc - 20:51

Eryn s’humecta les lèvres, jaugeant son interlocutrice du regard.
Difficile de discerner vérité et mensonge dans l’obscurité ambiante. Plus difficile encore d’essayer de lire un visage lisse d’émotions. Quelques mois auparavant, lorsqu’elle avait rencontré Shura, elle avait tout de suite compris quel serait le talent de la jeune femme, ces aspects qui faisaient d’elle une tueuse innée. Mais c’étaient ces mêmes qualités qui, aujourd’hui, rendaient la situation si délicate.

L’absence de compassion, l’absence de haine, l’absence tout court…
Parfois, Eryn se demandait à quel point c’était vrai. Si Shura n’était pas juste particulièrement douée pour enterrer ses sentiments. Si tout n’était que mensonge, une façade, un moyen de se protéger. Pouvait-on ne rien ressentir ? L’ex membre des forces spéciales, elle, savait refouler sa conscience et ses sentiments, elle les ignorait soigneusement lors des missions. Mais une fois de retour sur sa couchette à la base, une fois assise en tailleur autour d’un bivouac avec ses compagnons, là, ils la submergeaient soudain en un raz de marée dévastateur. Là, la culpabilité assaillait son cœur d’un étau implacable. Là, le regard d’un torturé hantait son esprit. Là, les hurlements d’agonies vrillaient ses tympans. Là, encore, les murmures rampaient jusqu’à elle, accusateurs, intransigeants.
La camaraderie était tout ce qui avait maintenu son équilibre. Et encore. Combien, dans son métier, pétaient une durite ? Combien finissaient en institut, tremblants, délirants ? Combien, encore, mettaient tout simplement fin à leurs jours ? Une conversation très philosophique qu’elle pourrait bien avoir avec Dawn, un de ces quatre, autour d’une bonne bouteille de tort boyaux. Franchement, si on lui accordait un dernier jour de condamnée avant de filer pour Alcatraz, elle le ferait ainsi. Probablement respecterait-il son choix, et le fait qu’elle se rendît sans faire d’histoire. Aria, elle, ferait toute une scène, qu’Eryn ne se sentirait pas de supporter.

Elle s’ébroua mentalement, écartant les sinistres pensées, pour en venir à une conclusion qui, franchement, avait quelque chose de malsain : Shura n’avait rien de tout ça. Soit elle n’éprouvait vraiment rien ce qui la rendait dangereuse. Soit elle cachait bien son jeu et était toute aussi dangereuse. La probabilité de pouvoir la briser d’une simple pression psychologique était bien trop faible pour qu’Eryn s’essayât à ce petit jeu.

Et pourtant.
Sa réplique lui vint avec une sincérité surprenante. La vérité. Si elle refusait de croire un traitre mot de ce que prétendait Shura, elle pouvait, au moins, lui faire don d’une réponse sans ambages. Elle avait, de toute façon, encore un dernier avantage : Drake la voulait vivante. Elle avait toujours moyen de s’en sortir.

« Parce qu’aucun mutant ne sera épargné. »

Aucun.
Ni toi, ni moi.

S’il ne l’épargnait pas elle, Eryn Blake, cette soldat acharnée qu’il avait pris sous son aile, celle qui avait donné un second souffle à la dynamique de son unité, pourquoi épargnerait-il de vulgaires outils ?

Vivre avec cette connaissance était, en soi, un danger. Bien sûr, les mutants avaient leurs doutes, et il existait une certaine tension entre les membres « sains » de l’équipe – franchement, ce n’était pas parce qu’ils n’étaient pas mutants qu’ils n’étaient pas sérieusement frappés – et les contaminés. Mais l’intime conviction d’Eryn n’avait rien à voir avec un simple le doute. Elle l’avait lu dans le regard de Drake Carter. Elle le savait.
Bien sûr, elle n’avait pas été la seule à venir à cette conclusion. Quand quelqu’un se montrait trop suspicieux, il disparaissait généralement au cour d’une mission tortueusement dangereuse. Comme elle le définissait plus tôt : de la chair à canon. Bien sûr, Eryn, par la nature singulière de son don, faisait quelque peu exception. Elle serait la dernière à y passer. Quelle chance.

Eryn se demandait ce que Shura pourrait faire de cette information.
Elle se demandait si elle allait s’en offusquer. Si elle allait la traiter de menteuse. Ou si elle allait simplement hausser des épaules, indifférente.
Non, cela ne pouvait pas l’indifférer. S’il y avait une chose qui rendait les deux femmes semblables, c’était l’instinct de survie. Shura était une survivante jusqu’à la moelle.

Elle se décala d’un pas, lentement, sans perdre son opposante des yeux, son Beretta toujours braqué sur elle. Elle devait se rapprocher, lentement mais sûrement, d’une issue. Elle devrait pour ça descendre les escaliers. Mais plus elle y pensait, plus elle réalisait qu’il lui faudrait en venir aux mains. Quand bien même Shura la laissait partir, Eryn ne parviendrait jamais à mettre suffisamment de distance entre elle et ces lieux avant que la Hunter n’atteignît sa base. Or, une fois Drake Carter au courant de l’ancienne position d’Eryn, se serait tout un comité qui se déploierait pour lui mettre la main dessus. Avec sa jambe pas suffisamment guérie, elle ne s’en sortirait jamais à moins d’obtenir une bonne avance sur ses poursuivants.
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Shura Kiryll

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 4 Jan - 20:52

Sa réponse brute, sans équivoque, ne me convainquit qu'à moitié. Bien sûr, savoir et comprendre ce que ferait Carter si chaque membre de son équipe venait à évoluer en Mutant était un atout que je ne comptais pas négliger. Connaître les réactions d'un homme que je ne connaissais pas très bien et qui pouvait potentiellement devenir un ennemi d'un jour à l'autre, sans subterfuge ni mise en garde, était un bénéfice unique qui valait le coup. Néanmoins, était-ce si mal de faire disparaître tous les Mutants ? Personne ne savait comment fonctionnait la contamination. Personne ne savait si la contamination n'allait pas devenir un jour dangereuse, pour l'humanité et pour l'ex-humain contaminé. Personne ne savait si la contamination pouvait évoluer. Il fallait bien réagir.

Et de ça, Eryn ne m'avait pas convaincue. Pourquoi laisser vivre des personnes qui pouvaient se révéler nuisibles ? L'ex-membre des Chasseurs étaient ainsi guidée par son instinct du survie certes, mais également par le cœur. Garder une menace en vie était illogique et irrationnel. Même si une petite fille avait l'air gentil et inoffensif, elle pouvait très bien s'avérer être un danger si on ne s'en occupait pas. La pitié et la bonté de cœur étaient souvent fourbes et déloyales.

Traître à soi-même.

Je la regardai se décaler d'un pas. Sa démarche vacillante et hésitante devait être due à une blessure, fraîche ou non, certainement pas guérie. Gardant cet indice dans un recoin de mon esprit, je focalisai mon attention sur elle sans pour autant perdre une miette de ce qui se passait autour. Le vent avait recommencé à souffler et le froid me mordait de plus en plus les joues. Mes mains, gelées malgré les gants, étaient trop loin de mon arme et je ne pouvais rien contre une Eryn armée de son Beretta. La solution la plus simple - et unique si je voulais rester en vie - était la plus risquée. Je fis un pas vers la porte en levant les mains.

- Tu as répondu à ma question. Comme je te l'ai dit, je te laisse partir.

Mon manque d'émotion ne suffirait sûrement pas à la convaincre, mais j'espérais que l'ex-membre de l'équipe se souviendrait que, jusqu'ici, je n'avais aucunement manqué à ma parole. En effet, je tenais toutes mes promesses et faisais en sorte de ne jamais aller contre mes propres décisions. Lorsque nous faisions équipe, même s'il ne s'était agi que de très peu de temps, tous mes engagements avaient été respectés et je n'avais jamais manqué à ma déclaration. J'avais dit à Eryn que je n'essaierai pas de la retenir. Et j'allais me conformer à cet engagement.

Je n'avais juste pas spécifié combien de temps.

Je ne savais pas quelle réaction allait avoir Eryn. Comme je l'avais déjà dit, je ne la connaissais pas assez pour anticiper ses ripostes, ce qui contrariait fort mes plans. Elle avait le choix. Soit elle me retiendrait, m'empêchant de dévoiler sa cache, soit elle prenait le risque de me laisser partir. Cette dernière possibilité était fort peu probable et de nature suicidaire ; d'après ce que j'en avais déduit depuis le début de cette rencontre, c'était qu'Eryn était tout sauf ce genre de personne. Si elle s'était battue jusqu'ici, ce n'était guère pour abandonner maintenant, devant moi en outre. Au contraire, me laisser partir était un risque trop grand pour elle, et je me doutais que mon départ n'allait pas être si facile.


Dernière édition par Shura Kiryll le Ven 9 Jan - 20:51, édité 1 fois
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Jeu 8 Jan - 19:15

Shura pouvait-elle seulement comprendre ?
Certes, elle pouvait anticiper le risque de devenir elle-même mutante, mais à l’heure actuelle, elle ne l’était pas. Elle était sauve. Drake l’avait prise sous son aile. Comment, dans ces conditions, pouvait-elle compatir ? Comprendre qu’ils massacraient des innocents ? Elle aurait peut-être dû commencer par lui exposer ces faits-ci, mais doutant de l’utilité de ses propos, Eryn préféra s’abstenir : l’idée d’avoir l’air de se justifier lamentablement l’horripilait.

Voilà, elle lâchait l’affaire trop vite. Elle n’avait pas demandé de précisions. Pas protesté non plus. Elle avait sagement emmagasiné l’information, la garderait dans un coin de sa tête, mais avec une indifférence qui révulsait Eryn. Peut-être éprouvait-elle de la jalousie, aussi. Mais surtout, Shura vivait et combattait auprès de ceux qui comptaient tant pour elle. Sauf que contrairement aux membres de l’unité du Lieutenant Carter qui avaient été entraînés à obéir aux ordres, à faire le mal pour une grande cause, Shura, elle, n’était qu’une gamine perdue et insensible. Une colère teintée de pitié enflait en elle. Agir pourtant, était prématuré.

Shura fit mine de s’en aller, mains en l’air.

« Pas si vite. »

Eryn descendit d’un pas rapide les marches qui restaient, ignorant la douleur, sans lâcher sa cible. Elle approcha Shura, tous ses muscles tendus, prête à réagir au moindre signe d’assaut. Mais avec le canon pointé sur elle, ce ne serait que folie de s’attaquer à Eryn. Quand bien même parviendrait-elle à la désarmer, l’ex membre des Forces Spéciales, si elle se sentait attaquée, ne répliquerait pas pour se défendre, mais pour tuer, sans la moindre hésitation. Comme un chien d’attaque que trop bien dressé.

Eryn délesta méthodiquement et prestement Shura de ses armes, puis lui indiqua de se tenir contre la barre de la cage d’escalier. Elle lui lança un sac, et lui demanda de bien vouloir sortir la corde, sèche et laconique. L’esquisse d’un sourire froid effleura les lèvres d’Eryn. Elle n’agissait pas de la sorte pour tenter d’humilier son adversaire, loin de là. Au contraire, elle lui montrait ainsi qu’elle reconnaissait sa valeur. Si Shura avait été entraînée convenablement, elle irait se cacher pas loin et attendrait de pouvoir la suivre, ou, si Eryn ne bougeait pas, patienterait pour les renforts. Et alors, ce serait fini.

L’autre raison pour laquelle Eryn agissait ainsi, c’était qu’elle voulait quelques informations. Elle avait deviné les raisons de l’inactivité des Hunters pendant quelques mois, mais elle voulait maintenant avoir quelques détails plus spécifiques : où en étaient les stocks, les munitions, s’il y avait eu de nouvelles recrues, des Hunters étaient-ils toujours infiltrés dans la Bright Town… Bien sûr, Shura pourrait lui mentir, et à cela elle devait exceller… Mais, il valait mieux essayer. D’autant plus qu’un bon mensonge contenait toujours une part de vérité. Elle comptait sur ces légers indices. Elle ferait le tri plus tard. Et elle avait un avantage non négligeable : elle connaissait l’unité de base mieux que quiconque, ce qui lui faciliterait la tâche.

La corde sortie, elle attacha solidement Shura. Ainsi, si elle avait manqué la moindre arme, elle ne pourrait pas l’atteindre. C’était de la bonne corde et Eryn était plutôt mécontente de devoir s’en séparer, mais l’enjeu était de taille. Et le temps lui était peut-être compté : et si l’absence de Shura était remarquée ? Si une patrouille de Peacekeepers passait dans le coin pour ramasser quelques cadavres ? Les risques qu’elle prenait l’agaçaient.

« Désolée pour le désagrément, » enfin, elle était plus désolée pour elle-même que pour Shura, « mais j’ai quelques questions à te poser d’abord. »

Eryn toisa Shura, évaluant ses chances d’obtenir quoi que ce fût d’utile, et le degré de coopération – factice – de sa prisonnière. Elle n’avait pas l’intention de s’adonner à un interrogatoire musclé. Cela ne lui rappelait que trop la guerre et ce qu’elle avait dû infliger dans d’autres circonstances. Et puis, quelque chose lui soufflait que brutaliser Shura serait probablement contreproductif.
Ceci étant, la possibilité qu’elle en vînt à la torture devait être une crainte tangible pour Shura – si elle était en mesure de ressentir la moindre appréhension à la perspective d’un moment particulièrement désagréable et douloureux.
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Shura Kiryll

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Sam 10 Jan - 21:08

Ne pas bien connaître Eryn ne m'avait guère pénalisée pour ce qui était de sa réaction face à mon amorce de départ. Je m'étais bien doutée que je n'allais pas pouvoir partir sans problèmes, et c'était chose faite. Obligée de sortir une corde avec laquelle je fus attachée, j'eus l'étrange impression de porter ma croix à l'instar de Jésus. Pensée déconcertante qui ne m'aida pas vraiment. Ainsi attachée, incapable de faire autre chose que respirer, je n'avais aucun moyen pour m'échapper ou, justement, l'empêcher de se sauver.

Son regret ne m'atteignit pas - je pensais même qu'elle ne s'excusait pas vraiment pour mon état. A vrai dire, je n'avais pas prévu d'être ainsi ficelée comme une saucisse, mais plutôt blessée à la jambe ou à l'abdomen, assommée ou même attaquée par un autre Mutant invisible avec qui Eryn aurait pactisé, juste après quoi celle-ci serait partie sans demander son reste. Quand on est pourchassé, quelques minutes voire quelques secondes pouvaient faire la différence. Si j'avais correctement suivi les ordres en prenant le matériel nécessaire à une patrouille, d'autres chasseurs auraient déjà été prévenus de la présence d'Eryn dans ce lieu. J'avais fait une erreur, que je ne comptais plus refaire.

Le fait que l'ex-membre de l'équipe ne profite pas de l'occasion pour se faire la malle m'intrigua. Jusqu'à son explication. Ce qui était logique, si on y regardait bien. Après avoir fait partie des chasseurs bien avant que le terme n'existe réellement, la femme que j'avais en face de moi avait dû quitter les rangs pour sauver sa vie et son mental - si j'avais bien compris jusqu'ici -, et était traquée comme un animal étant victime de la peste. Même si rester au même endroit après avoir été démasquée pouvait être un réel risque, avoir des informations sur les missions ou même sur des choses qui pouvaient me paraître futiles était un avantage considérable pour Eryn. Un avantage dont elle ne pouvait pas se passer, en sachant qu'il s'offrait presque comme sur un plateau en argent.

Je me risquai à un sourire amusé. Inaccoutumée à ce genre de démonstration d'émotion que je ne ressentais plus depuis des années, j'eus la sensation d'étirer mes joues en une grimace étrange. Le nez retroussé, je ne devais pas vraiment paraître amusée, et j'abandonnai bien vite l'idée. Il allait falloir que je m'entraîne encore un peu pour simuler la sympathie. De plus, je ne pensais pas que faire preuve d'amabilité en ce moment m'aiderait beaucoup ; Eryn était bien trop paranoïaque et méfiante pour se laisser faire. Je haussai alors simplement les épaules, du moins autant que je le pus en étant attachée.

- Je réponds à tes questions si tu réponds aux miennes, dans la mesure du possible.

Nous savions toutes les deux quelle pourrait être la tournure de l'interrogatoire si je refusais de répondre. La douleur ne me faisait pas peur - je n'étais pas assez émotive pour avoir peur de la mort non plus -, je ne risquais pas de dévoiler des informations. Seulement, avoir une contrepartie m'intéressait, et même si j'étais pour l'instant du côté des chasseurs, n'oublions jamais que tout pouvait changer d'un jour à l'autre. Je n'offrais pas à Eryn toutes les réponses à toutes ses questions - il y aurait forcément quelque chose dont je n'étais pas au courant ou que je ne voudrais pas dévoiler, question de bon sens.

Être attachée, vulnérable, sans protection, n'était pas dans mes habitudes et je comptais bien inverser la tendance. Je ne pouvais rien faire pour le moment, mes armes étaient trop loin de moi et rien n'était à portée pour me détacher. Soit j'essayais de la convaincre de me détacher - elle n'allait quand même pas me laisser mourir de froid ici... sans oublier si d'autres Mutants me découvraient sans défense, je ne pariais pas cher de ma peau -, soit j'étais bonne pour la pire débrouille à laquelle je n'aurais jamais eu affaire jusqu'ici.
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Eryn Blake

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Sam 10 Jan - 22:34

Eryn arqua un sourcil en notant « l’amusement » de Shura.
Il était plutôt difficile de déceler un tel sentiment sur les traits de la jeune femme. Le rictus qu’elle affichait avait quelque chose de forcé, sauvage. Une grimace, presque. En d’autres circonstances, elle aurait peut-être lâché une réplique provocatrice. Oh, elle imaginait plutôt bien la scène, là, à la base des Hunters, assise au milieu de ses camarades d’unité et, un peu plus en retrait, les nouvelles recrues. Shura parmi eux, avec cette drôle de façon de sourire. La taquinerie aurait fusée sur un ton de franche camaraderie, pas forcément de la bouche d’Eryn, mais ils auraient tous pensé à la même chose de toute façon. Puis, la petite assemblée aurait été parcourue de demi-rires, de souffles amusés, chacun s’exprimant de cette façon discrète.

À l’unisson.

Eryn ignora son cœur qui se serra à cette pensée, à cette réalité alternative fantasque qui, parfois, peuplait ses rêves éveillés. Elle avait beau s’interdire de raisonner de la sorte, les fantômes de son ancienne existence ne cessaient de rôder autour d’elle, qu’ils fussent ses anciens camarades ou ces vies qu’elle avait volé lors de ses prouesses militaires.

Soit, mademoiselle voulait négocier.
Pour une fois, l’échange ne lui paraissait pas absurde. Pouvait-elle s’y résoudre pour autant ? C’était mettre en danger la vie d’autres mutants que de révéler les secrets de la Seamy Area à une Chasseresse en herbes. D’un autre côté, que pouvait-elle lui révéler que Drake Carter n’aurait pas déjà deviné ? Que ce fut sur la Communauté de Jake Caldwell – dont elle se tenait à l’écart même si elle aimait garder un œil sur leurs déplacements – ou les habitués du Black Market, il avait déjà ses espions partout.

Elle fronça les sourcils – volontairement ; ce n’était pas là une vulgaire erreur où elle laissait échapper ses états d’âmes – pour signifier le peu de conviction qu’elle accordait à ce marché, mais s’accroupit néanmoins devant Shura pour que leurs visages soient à la même hauteur. Elle se tenait juste à la bonne distance : suffisamment loin pour être hors d’atteinte, suffisamment près pour lire sur les traits de l’interrogée et pouvoir réagir si les choses de gâtaient. Ne jamais perdre de vue l’éventualité où la proie devient le chasseur, hein. Elle n’avait pas lâché son Beretta pour autant, toujours niché dans sa paume, reposant sur sa cuisse.

On allait pouvoir commencer.
Eryn devait choisir soigneusement ses questions, pour prendre garde à ne pas révéler ses objectifs, ne pas donner d’indication sur ses prochaines destinations, ne pas mettre Aria en danger… Mais obtenir un semblant de réponse qui, peut-être, aurait un fond de vérité. Et elle devait aussi rester attentive au moindre détail, tout en mémorisant soigneusement au mot près ce qui allait être dit. Cela faisait que trop longtemps qu’elle ne s’était pas prêtée à ce genre d’exercice et elle commençait à regretter d’avoir négligé cette partie de son entraînement depuis sa fuite.

« Les stocks de la base de Carter sont-ils confiés aux nouvelles recrues, ou seulement aux membres des Forces Spéciales ? »

C’était une mise en bouche, une perte de temps même, que s’attarder sur cette question. Son objectif pouvait être deviné que trop facilement, ses implications aussi. Mais Eryn savait aussi que la réponse serait cruciale pour amorcer un tout autre décryptage : à quel point Shura consentirait-elle à lui donner de véritables réponses ? Après tout, ce n’était pas comme si Eryn allait prendre d’assaut leur forteresse qui donnait sur la baie de San Francisco…
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 11 Jan - 15:32


Accroupie à quelques pas de moi, Eryn semblait avoir accepté ma proposition. Soit, je n'avais plus qu'à honorer ma promesse. Sans oublier le Beretta sagement gardé dans sa main, j'étudiai son visage dans l'espoir d'y discerner quelque chose. Rien, à croire que je me voyais dans un miroir. Soit Eryn était particulièrement douée pour cacher ses émotions durant une mission, soit elle n'avait aucun regret de m'interroger au lieu de s'enfuir au plus vite. Je n'arrivais pas encore à me décider laquelle des deux hypothèses était la plus probable dans son cas, même si je penchais sérieusement pour la première supputation. Pour l'avoir côtoyée pendant quelques temps, j'avais quand même remarqué qu'elle n'était pas aussi froide que moi.

Son froncement de sourcils m'intrigua, mais uniquement parce que jusqu'ici, cette femme avait fait attention à ne rien dévoiler. Aucune pensée n'avait fuitée et, brusquement, un mouvement changeait la donne. C'était trop fulgurant, trop inattendu pour que j'en prenne réellement compte. Néanmoins, ce changement pouvait quand même signifier quelque chose. Était-ce vraiment du scepticisme dans son regard ? A croire que je devais encore prouver ma bonne foi. J'étais quand même attachée, je ne pouvais rien faire qui pourrait la mettre en porte-à-faux.

Sa demande me surprit légèrement. Je pensais entrer directement dans le vif du sujet, Eryn n'ayant pas énormément de temps devant elle, mais elle avait apparemment préféré me questionner à propos des stocks. Non pas qu'il s'agissait de quelque chose dont le monde extérieur était au courant, mais ce n'était pas non plus une information confidentielle qu'il fallait à tout prix protéger, au péril de notre vie. Ce que je voulais dire, c'était qu'Eryn devait sûrement être au courant de l'organisation utilisée. Peut-être avait-elle un doute - après tout, Carter aurait très bien pu changer après sa désertion -, mais je me devais d'y répondre, comme convenu.

- Nous connaissons toutes les deux la réponse sur ce sujet. Membres des Forces Spéciales. Aucun mutant, si c'est ça ta vraie question.

J'avais penché la tête sur le côté, réfléchissant à ma propre demande. Je ne pouvais guère lui demander quelque chose de personnel et de trop direct, sans quoi elle risquait de se fermer comme une huître. Choisir correctement ses mots était primordial et je pris donc mon temps. Je n'avais aucun prétexte pour me dépêcher, après tout Eryn avait choisi de rester pour m'interroger, perte de temps qui pouvait se révéler fâcheuse ou avantageuse, selon les réponses obtenues.

Les yeux plissés, je me rendis compte de ce que je venais de lui dire. Certes, Carter ne faisait pas confiance aux mutants de son équipe, mais dans ce cas, pourquoi les avoir engagés ? Ça pouvait nous donner une avance considérable seulement s'ils nous aidaient réellement. Or, si on traite une poule comme un objet, celle-ci ne nous donnera jamais de bons œufs. C'était la même chose pour les Mutants faisant partie de notre groupe. Utilisés comme des objets, ils ne mettaient sûrement pas tout leur cœur à la tâche.

- Pourquoi penses-tu que les Mutants devraient vivre ? Essaie de faire plus d'une phrase cette fois-ci, ajoutai-je, presque sarcastique, avec plus de compléments que de sujet.

Essayer de mieux la connaitre était une perte de temps que je ne voulais pas subir. Je préférais essayer de comprendre ses décisions à défaut de savoir comment elle fonctionnait ; cela pourrait avoir un léger avantage. Carter ne nous avait pas vraiment parlé des stratégies utilisées par Eryn durant ses missions, et faire sans informations était légèrement suicidaire. Je n'étais pas kamikaze, personnellement. Ça n'avait rien de logique, de se tuer pour une opinion. Une mort ne peut changer le destin d'une nation ou d'un peuple.
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Eryn Blake

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 11 Jan - 17:36

Rien n’avait changé.
Premièrement, Eryn en avait déjà la certitude avant la réponse, mais cette confirmation lui donnait une tonalité pour la vérité, si seulement Shura en avait une. Le fait que la gestion n’eût guère changé indiquait aussi que ses calculs concernant les stocks des Hunters étaient probablement exacts, ses estimations pour le ravitaillement de certaines denrées pourraient lui permettre d’éviter certaines zones à risques. Cela impliquait, bien sûr, qu’ils n’eussent pas recrutés un nombre important de partisans entre temps. Un grossissement des rangs se serait remarqué en temps normal, mais, avec les gens qui se terraient pour l’hiver ? Moins sûr.
L’information fut dument enregistrée.

La question avait aussi pour but de faire réaliser à Shura combien les mutants n’importaient pas pour Carter, qu’ils n’étaient que des objets, un moyen pour parvenir à une fin. Bien entendu, si elle pensait que cette réflexion venait d’elle-même, elle serait plus à même d’en tirer les conclusions… Mais Eryn avait beau se concentrer, rien chez Shura n’indiquait qu’elle deviendrait un jour mutante. Résolument saine.


Un sourire sans joie frémit sur ses lèvres.

« Je n’ai jamais dit que je pensais que les mutants devaient vivre. »

C’était bien cela, le pire. Elle comprenait tout à fait la logique de Carter,  ce qui restait de la subordonnée dévouée adhérait encore à cette tactique. Elle savait que trop bien que les mutants étaient un problème majeur, que la société ne les accepteraient jamais. Parqués pour le moment, ils étaient voués à disparaître. Ils étaient dangereux. Et personne ne savait ce qu’il adviendrait dans quelques mois ou quelques années de ces mutants. Ils pouvaient tous mourir, leur métabolisme rejetant l’Agent Mutagène. Ou ils pouvaient continuer d’évoluer, faisant peut être d’eux des dieux sur terre.

Protéger le pays revenait à les arrêter.
Les tuer était probablement trop extrême. Les livrer à la Neo Corp. pour autant ? Tout dépendait de ce qui se passait au sein de la mystérieuse entreprise. Chose sur laquelle elle comptait se pencher très prochainement.

Eryn était, toujours, en proie au doute.
Mais contrairement à ce qui la faisait hésiter lors de sa fuite, elle avait désormais des objectifs bien arrêtés : sortir Aria de là, et découvrir qui était à l’origine des mutations et de l’incident. Il fallait bien commencer par quelque part, et elle ne pouvait se résoudre à l’inactivité.

Elle hésita un instant à épiloguer, histoire de faire preuve d’esprit de contradiction quant au semblant de sarcasme dont son interlocutrice avait fait preuve. Puis elle avisa que, si elle espérait des réponses consistantes, elle devrait mettre un peu du sien.

« Par contre, je pense qu’il ne sont qu’un dommage collatéral, des innocents pour la plupart. D’autres solutions devraient être explorées, des négociations entamées... Si on pouvait faire pression sur le maire… »

Non, il était trop tard pour ça, pour pouvoir communiquer leur détresse à l’extérieur, demander la coopération des mutants pour permettre à tous ceux qui n’étaient pas contaminés de partir. Et pourtant ? Serait-ce si impensable ? La Neo Corp. avait de toute évidence des moyens d’évaluer qui était mutant et qui ne l’était pas. Et si les sains se rendaient par petits groupes au niveau du blocus, étaient testés, puis libérés ?

Bien sûr, en rien elle ne laissa entendre le reste de ses motivations, l’esquisse de ses plans. Shura pouvait très bien extrapoler, il restait des dizaines et des dizaines de possibilités qui n’impliquaient pas de la famille ou une prise en main de sa part. Après tout, elle n’était qu’un clébard de l’armée bien dressé, une arme qui n’avait qu’une seule fonction : obéir aux ordres.

« Et tu devrais arrêter de te poser des questions sur mes motivations », poursuivit-elle amèrement. « Les gens normaux ne restent pas sain d’esprit longtemps dans un métier comme le mien. »

Elle illustra ses propos en effleurant sa propre tempe du canon de son arme, mimant vaguement le geste que d’autres avaient esquissé avant elle.
Dans cette réplique, elle avait néanmoins pris soin de se distinguer de Shura ; la jeune femme ne pouvait pas comprendre. Elle ne pouvait pas comprendre qu’être dans les Forces Spéciales ce n’était pas s’engager dans une faction qui éliminait par haine ou par crainte comme la plupart des Hunters faisaient. Ce n’était pas simplement éliminer une menace purement et simplement. C’était marcher sur le fil du rasoir, mettre son sens de l’éthique de côté, ses valeurs, ses sentiments pour défendre une seule et même cause. Coûte que coûte.
Alors oui, au bout d’un moment, certains lâchaient.
Ou ne faisaient pas de vieux os.

Mais ça, c’est hors de ta portée, hein, Shura ? semblait dire son regard.

Eryn revint à ses moutons, choisissant soigneusement sa question.
Elle évita tout ce qui touchait aux effectifs, elle lui mentirait assurément. Elle refoula cette urgence soudaine de demander des nouvelles de Harper, du Lieutenant, et d'autres. Elle préféra quelque chose de plus précis, de plus anodin, de quoi brouiller les pistes aussi.

« Les Hunters infiltrés dans la Bright y sont-ils toujours ? »

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Shura Kiryll

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 11 Jan - 19:30


Eh bien voilà une argumentation complète. Un sujet, un voire plusieurs verbes et pleins de compléments ! Par rapport au contenu, j'étais totalement d'accord. D'autres solutions devaient être trouvées certes, mais ce n'était ni mon travail, ni ma première préoccupation. Un jour, qui sait, l'avenir me forcera à modifier mes plans, mais pour le moment la seule chose qu'il me fallait était d'obéir aux ordres et de réussir mes missions. Sans ça, mon avenir serait incertain et je n'avais pas vraiment besoin de ce problème. Ma vie me convenait pour le moment, et même si je risquais de mourir à chaque instant, je n'en avais cure.

Je fixai mon regard sur son arme, portée négligemment sur sa tempe en un geste vague mais pourtant très éloquent. Ma langue me démangea particulièrement, me surprenant. Je n'avais pas pour habitude de titiller les autres, je n'en voyais pas bien le but, mais à cet instant précis j'avais bien envie de lui dire que j'avais remarqué qu'on ne restait pas sain d'esprit dans l'équipe, en commençant par elle. Devenue paranoïaque, aussi méfiante qu'un animal blessé, elle semblait à bout de nerfs et pourtant totalement sous contrôle. Encore un problème de taille et elle craquerait sûrement.

« Les gens normaux » avait-elle dit. Étais-je considérée comme normale ? Et puis, qu'est-ce que "normal" voulait réellement dire ? Les normes n'étaient créées que par les humains pour les humains, car ceux-ci ne supportaient pas tout ce qui était étranger à leurs connaissances. Si on regardait par rapport aux conventions, non, je n'étais pas dans les standards. J'étais bien tout le contraire ; inhumaine, froide, impassible, tout ce que les autres refusaient de considérer comme étant possible. Mais je doutais fortement que ça, c'était ce qu'Eryn avait voulu dire. Comment savoir ?

- Carter ne partage pas ce genre d'informations avec les recrues. Les infiltrations ne sont pas notre domaine de prédilection.

Ni froideur exagérée, ni sentiment exagéré. C'était la seule réponse que je pouvais lui donner. La confiance du chef n'était pas assez développée envers ses nouvelles recrues pour donner de telles informations, encore moins aux Mutants, sauf pour les principaux concernés. En vérité, Eryn avait peu de chances de me tirer les vers du nez, tout comme j'avais peu de chances de lui tirer les vers du nez. On risquait surtout de retourner à la case départ.

Si Eryn n'osait pas me questionner sur ses véritables préoccupations, je n'en étais pas au même niveau. N'ayant rien à perdre à part ma vie - et je ne pensais pas réellement que poser des questions risquait de me faire tuer -, autant expérimenter. Qui ne tente rien n'a rien.

- Qui t'a blessée ? Que je sache comment m'y prendre, la prochaine fois.

A croire qu'être en contact avec Eryn me faisait devenir de plus en plus sarcastique. Si ma phrase pouvait paraître railleuse, mon ton était trop froid, trop impersonnel, mon visage et mon corps trop fade pour y lire quoi que ce soit. L'avantage de refouler les émotions depuis tout petit est, qu'au bout de plusieurs années, c'est comme si plus rien n'existait en vous, à part peut-être de légers sentiments incapable de changer votre façon de voir le monde. Les gens pouvaient penser que j'étais juste assez dure et froide pour cacher mes sentiments, mais que j'en ressentais vraiment. Alors que la vérité était toute autre. Quand on nous répète des choses à longueur de temps, on finit par y croire.
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Eryn Blake

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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 11 Jan - 19:57

Soit Shura était plus bête qu’elle en avait l’air, soit elle cachait bien son jeu.
Les membres infiltrés ne pouvaient pas être « réellement » infiltrés, il y avait trop de risque que des messagers assurant le relais entre des agents stationnaires attirassent les soupçons ou fussent interceptés. Non, ils effectuaient le déplacement, systématiquement. Eryn aurait-elle dû demander quels membres des Hunters allaient et venaient, constamment pour des missions de longue durée ? Probablement. Elle avait déjà écarté le sujet, ceci dit. Que Shura n’en sût rien pouvait signifier deux choses : que les agents avaient été consignés à la base ou à la Bright pendant toute la durée de l’hiver. Quoi que cela signifiât, la probabilité qu’elle eût à se méfier d’agents trop nombreux dans la Bright était infime.

On passait déjà à la question suivante.
Une question qui pouvait fâcher.
Eryn s’humecta les lèvres, un éclat furieux dans le regard.

Et pourtant, elle maîtrisait toujours parfaitement la situation. Après tout, elle était aisée à anticiper, cette question, et sa blessure encore flagrante. Un pli aigre barra son front et ce fut d’un ton âcrement abrasif qu’elle répliqua :

« J’voudrais bien savoir, figure toi, histoire de lui rendre la monnaie de sa pièce. Ce satané mutant peut se rendre invisible. »

Le mensonge avait quitté sa bouche avec l’aplomb d’une vérité agaçante. Eryn n’aimait pas se sentir vulnérable et sa blessure la handicapait. Autant dire qu’il était aisé d’être crédible quand les rares émotions qu’on laissait filtrer était authentiques, en parfaite adéquation avec ce que l’on proférait.

La vérité ?
C’était Harper qui l’avait blessée. Elle espérait sincèrement ne pas avoir fait d’erreur de jugement, que son ancien compagnon avait vraiment tut leur altercation, et que son mensonge ne serait pas révélé au grand jour. Après tout, on n’était jamais à l’abri d’un piège… D’un autre côté, si Shura avait su la date et l’ampleur de sa blessure, n’en aurait-elle pas déjà joué ? Eryn ne laissa pas son appréhension transparaître, mais poursuivit :

« Navrée, Kyrill, aux dernières nouvelles, tu n’as pas ce genre de… talent. »

La provocation gratuite, elle, lui avait plus ou moins échappé.
Ce n’était pas que ses propos manquaient de pertinence, Eryn était tout à fait satisfaite avec l’image qu’elle donnait d’elle-même et il était bon, par moment, de remettre Shura à sa place. Seulement, cette familiarité commençait à faire gonfler en elle un élan de nostalgique qu’elle ne pouvait s’autoriser.

« La patrouilles ont déjà repris, ou t'es ici de ton propre chef ? »

C’était une question bien plus directe, mais bien moins dangereuse aussi.
En soi, elle n’était même pas d’une grande utilité pour Eryn. Elle avait une plutôt bonne idée du timing de Carter et, s’il lâchait des gens dans ces conditions climatiques, ce ne serait probablement pas les membres de son unité. C’était un stratège posé, et sa tactique n’impliquerait pas d’épuiser ses ressources. Par contre, la réponse en dirait plus long sur Shura, pour un peu qu’elle se donnât la peine de développer : s’était-elle accordée le droit d’une petite virée ? Ou bien était-elle considérée comme de la vulgaire chair à canon comme les mutants ? Non, non, les recrues humaines devaient être traitées en héros – et risquaient plutôt la prison que la cour martiale quand tout ce bordel serait terminé.

En avait-elle seulement conscience, des implications de ses actes ?
Ou bien vivait-elle au jour le jour tel un chien errant que Drake aurait pris en pitié ?

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Shura Kiryll

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Shura Kiryll
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 18 Jan - 17:39


Un Mutant capable d'être invisible aux autres ? Il ne manquait plus que ça. Il y avait vraiment toutes sortes de mutations, c'était surprenant. Encore un peu, et je me retrouverai avec un Mutant pouvant se transformer en un énorme dragon cracheur de feu, aussi gros qu'un building. Si je survivais à ça, je démissionnerais sans hésiter ! Il n'y avait aucune logique à risquer sa vie à faire face à des monstres, tout en n'ayant qu'un minuscule toit et de maigres vivres pour survivre en échange. Et être cramée à point n'était pas une solution envisageable, même pour se réchauffer en hiver.

Provocation.

Son reproche déguisé me parut bien plus naturel que tout ce qu'elle avait bien pu me dire jusqu'ici. Toutes ses phrases, tous les mots prononcés avaient été choisis afin de ne pas me donner involontairement d'indices sur ses projets, ses sentiments ou même son état d'esprit. Être ainsi traquée ne devait pas l'avoir rendue très sociable, ses réflexes devenant plus pragmatiques et instinctif. Pourchasser un animal le rendra plus bestial qu'autre chose ; c'était la même chose pour les êtres humains, peu importait ce qu'en disaient les scientifiques. Ceux-là n'étaient pas en condition pour prouver le contraire ; Eryn et tous ces humains devenus Mutants contre leur gré - ou non - en étaient la preuve vivante.

Talent, ou faiblesse ?

Si Eryn n'était pas devenue Mutante, si elle n'avait pas été obligée de partir pour sauver sa peau, aurait-elle réellement quitté les rangs ? Sa mutation l'avait forcée à partir si elle ne voulait pas finir en croquettes pour chiens mutants, mais aurait-elle eu la même réaction si un Mutant essayait de sauver sa propre peau en faisant exactement la même chose ? A chaque moment où on ramenait un Mutant, s'était-elle mis à sa place ? Avait-elle pensé qu'il voulait juste vivre ? Ou avait-elle simplement réagi, étant au pied du mur ? Je ne pouvais pas dire si elle avait suivi les ordres de Carter comme un bon petit chien jusqu'à ce que cet éclair de lucidité change la donne. Mais ce que je pouvais dire, c'était que les ex-humains, les Mutants sans entraînement, n'avaient pas autant de probabilité de réussite lors d'une fuite. Alors, talent, ou faiblesse ?

- Tu m'as fouillée, Blake. Tu devrais savoir que si j'étais sortie de moi-même, jamais Carter n'aurait accepté que je pioche dans son stock d'armes.

Question inutile de posée, question utile de perdue. L'échange entre nous n'allait pas durer éternellement, Eryn allait bien se rendre compte à un moment ou à un autre qu'elle devait dégager vite fait de là. J'avais fait preuve d'honnêteté en lui disant que j'avais été envoyée en mission, et c'était à ses risques et périls de prendre en considération ma remarque ; étais-je fiable, ou non ? Sa méfiance était trop importante pour qu'elle me fasse confiance immédiatement. Je la regardai sans hésiter pile dans ses yeux ; on pouvait voir dans les yeux si une personne mentait ou non. Néanmoins, n'éprouvant rien d'autre qu'un instinct de survie assez peu développé si je mettais de côté ma logique, je ne pouvais lui permettre de faire un choix, ne laissant rien dégager.

- Comment va ta sœur, Eryn ? Elle se porte bien ?

Appuyer là où ça fait mal. Et appuyer sur le dernier mot. Sous-entendre. Laisser l'imagination opérer. Et le travail est fait.
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Eryn Blake

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Eryn Blake
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Ven 23 Jan - 11:13

Le regard d’Eryn se fit plus perçant, cherchant une once de mensonge dans les propos de Shura.

Alors comme ça, Drake méprisait aussi ses recrues saines au point de les laisser vadrouiller sans armes lorsqu'ils ne remplissaient pas une mission pour lui ? Ou bien, Shura mentait-elle ? Fallait-il voir dans ses propos des stocks plus amoindris qu’elle ne l’avait d’abord pensé ? Pourquoi Shura patrouillait-elle seule ? Les rangs des Hunters avaient-ils soufferts de l’hiver, en dépit de leur équipement ? Finalement, la question peu utile qu’elle avait proférée s’avérait plus riche que les précédentes.

Voilà qui donnerait à Eryn à réfléchir.
Si elle tirait une certaine satisfaction de la tournure que prenait l’interrogatoire, elle n’en montra rien.

Elle n’en eut pas le temps.
Une rage bouillonnante commença à brouiller son jugement à l’instant même où le mot « sœur » avait franchi les lèvres de Shura. L’angoisse compressait sa cage thoracique et, l’espace d’un souffle, elle envisagea d’écraser son poing sur le joli minois impassible. Elle exécrait cet état de faiblesse. La mention de sa sœur, comme à chaque fois, lui donnait l’impression qu’un piège se refermait sur elle. Mais quand cela venait de Shura plutôt qu’Anderson Dawn, la menace prenait une toute autre ampleur.

Or, Shura devait le savoir, Eryn était entraînée à éliminer la menace.
Son doigt effleura la gâchette.

Bien sûr, Eryn ne se faisait aucune illusion.
Drake Carter la connaissait trop bien. Il savait, aussi, que sa sœur était susceptible de vivre à San Francisco. Et il avait très probablement déjà enquêté sur Aria Blake. C’était bien ce qu’Eryn redoutait le plus, qu’on mît la main sur sa sœur comme moyen de chantage. Si jamais il lui arrivait quelque chose… Oh, elle ne répondrait plus de rien. Et cela, Shura devait bien le comprendre,  à l’éclat dangereux qui anima soudain les prunelles d’Eryn, au fiel dont était empreinte sa voix.

« Aucune idée. Mais puisque tu la mentionnes, s’il lui arrive quelque chose, tu seras la première sur ma liste. »

L’hésitation était toujours là.
Si Shura était si apathique, Eryn pouvait bien s’autoriser un écart de conduite, plonger dans cette seconde peau, si détachée des sentiments humains. Pour protéger Aria…

Et pourtant, en dépit de la colère sourdre qui battait contre ses tempes, malgré la bile qui aigrissait sa gorge, une pensée raisonnable se faufila jusqu’à sa conscience : si elle commençait à éliminer des Hunters, elle ne ferait qu’empirer sa situation. Aria deviendrait alors une cible de choix pour la faire chanter, pour la faire arrêter. Les représailles seraient sans aucun doute dignes de la fureur de Drake Carter.
C’était probablement la raison pour laquelle Aria n’avait pas encore eu à faire face au groupe extrémiste. Tant qu’ils ne la provoquaient pas, les Hunters avaient peu à craindre d’Eryn. Et vice-versa.

L’ex membre des forces spéciales laissa sa colère retomber.
Ne pas céder à la provocation outre-mesure. Ne pas se laisser manipuler. Ne pas précipiter sa chute. Elle lança néanmoins à Shura un regard lourd de menace. Peut-être était-elle trop insensible pour craindre Eryn, mais cela n’importait peu. Elle comptait sur l’instinct de survie et la logique pragmatique de la jeune femme pour faire les calculs et réaliser que les sœurs Blake n’étaient pas des cibles judicieuses.

Elle consulta sa montre.
Il ne lui restait plus beaucoup de temps. Et elle ne comptait pas le gaspiller en davantage de questions, puisque Shura avait décidé de jouer avec elle. Ce n’était pas comme si Eryn pourrait trouver un point sensible chez la jeune femme, et donc elle ne s’y risqua même pas. Au lieu de cela, elle tira à elle le sac de Shura, qui n’était certainement pas partie sans rien pour se nourrir pendant sa petite expédition. La dépouiller de ses vivres lui faciliterait la tâche pendant les prochains jours.
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Shura Kiryll

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Shura Kiryll
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 25 Jan - 15:52


Frapper là où ça fait mal, sauver sa peau. Mon but n'était pas de me faire des amis, je n'avais pas de temps à perdre avec ça. La voir être victime d'une rage pure, impossible à contrôler, ne me fit aucun effet. Tout ce qui m'intéressait était de voir jusqu'où je pouvais la pousser. Jusqu'à quel point elle tiendrait, avant de craquer. Quand la folie prendra la dessus, injectant du sang dans ses yeux, y insufflant une lueur de démence, la défigurant en une aliénée au bord du précipice, j'aurai atteint mon but. Arrêter les Mutants est mon devoir ; les faire devenir fous, mon don.

Sa réponse glissa sur moi comme de l'eau sur un rocher. Sa menace me passa au-dessus. Je n'avais que faire de son essai d'intimidation. J'en avais à la pelle, je n'avais pas le loisir de m'en inquiéter, au risque d'en devenir paranoïaque et déséquilibrée. Bien au contraire, je notai chaque changement de position, chaque changement d'intonation, chaque changement pouvant me donner des indices. Je vis son doigt effleurer la gâchette - tire, Blake, tire, et tu prouveras que tu ne vaudras pas plus que n'importe qui d'autre. Je vis sa fureur soudainement soufflée. Je vis l'occasion me filer entre les doigts tandis qu'elle se mettait à fouiller mon sac. Je vis une possibilité.

Doucement.

Qu'elle prenne mes vivres. Qu'elle résiste quelques jours de plus. Qu'elle médite. Semer le doute dans l'esprit de quelqu'un n'était pas difficile. Trouver la faille était un plus grand mal dont je m'étais déjà occupé. Me procurer le moyen d'y immiscer ma graine n'était plus qu'un simple obstacle qui n'était ni dangereux, ni pénible. C'était même curieusement facile, si on y regardait bien. Tout être ressentant des émotions possèdait des failles plus ou moins grandes ; plus l'émotion était puissante, plus la chute était douloureuse. L'ex-chasseuse tenait à sa sœur, sa démonstration me l'avait bien prouvé, même si je ne pouvais pas dire si elles s'entendaient réellement bien ou non. Je n'avais plus qu'à y mettre mon grain de sel, et son esprit tournerait tel un tigre dans une cage.

- Fini, les questions ?

Voix froide, intonation plate, sans intérêt. Regard acéré, ne perdant pas une miette du spectacle. Corps tendu, prêt à l'action. Visage impassible, indifférent. Diction lente, laissant suggérer. Mon instinct prit le dessus. Ne pas la pousser dans ses retranchements tant que j'étais ainsi en difficulté. La laisser prendre le dessus. La laisser partir. A cela, je n'y pouvais rien. Ce que je pouvais, en revanche, était d'un tout autre ressort. Que peu de gens comprendraient.

C'était la raison pour laquelle Carter ne devait en aucun cas être mis au courant de cette entrevue. La laisser s'échapper reviendrait à une trahison à ses yeux, et je n'avais pas besoin de ça. Être mise à l'écart non plus. Faire mes preuves était important. Il ne comprendrait pas mes choix, pourtant bien plus logiques que la majorité des siens, et me ferait vivre un enfer pour avoir failli à ma mission. Je ne me rebellais pas ; je sauvais ma peau. Je faisais certes partie des Chasseurs à présent, mais la vie m'avait durement fait comprendre que rien n'était acquis. En cette période de tensions, je n'avais pas le droit de penser le contraire.

Concentration.

- Tu n'as pas envie de savoir si Aria est en danger. Tu refuses d'affronter les choses en face. Tu as peur. (Les yeux rivés sur son visage, j'examinai chacun de ses gestes, chacune de ses réactions.) Cette peur te fera commettre des erreurs. Et ce ne sera pas toi qui en paieras le prix à long terme. C'est elle.

Mon dos me chatouillait. Mes jambes me démangeaient. Mes fesses me picotaient. Je devais bouger de là. Rester attachée à ce mur n'était pas productif ; si un Mutant arrivait après le départ d'Eryn, j'étais cuite. Je ne comptais pas mourir tout de suite. Je comptais bien voir et suivre le déroulement et la continuation de cette histoire. L'ex-chasseuse m'avait fouillée mais, dans son empressement paranoïaque, avait négligée une partie. Et dans ma propre paranoïa, j'avais tout prévu. Comme garder une petite lame au chaud.

Au sens propre du terme.



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Eryn Blake

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Eryn Blake
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Message Sujet: Re: ~ Only God can judge me ~ [Terminé] | Dim 25 Jan - 16:50

Oui, fini les questions.

Eryn dépouilla méthodiquement Shura de ses munitions, en espérant qu’elle n’aurait pas besoin de si peu pour survivre. Difficile, après cela, de dissimuler sa rencontre auprès de Drake Carter, quand tant de balles manquaient ? Elle rentrerait les mains vides, et elle avait intérêt à trouver un mensonge digne de ce nom si elle désirait esquiver les foudres du chef. Ou son ignorance totale… Car s’il y avait bien un dicton que Drake Carter appliquait, c’était bien « l’ignorance est le plus grand des mépris ». Qu’il était douloureux, d’être délaissé ainsi, sans plus un regard, sans plus une parole ! Et la confiance accordée au soldat ainsi oublié se volatilisait par la même occasion.

Eryn était mieux placée que quiconque pour savoir que, sans l’approbation du lieutenant, on n’était plus rien, néant.

Elle laissa échapper un rire aigre.

Peur ?
La crainte était constante, la prenant à la gorge parfois dans les ténèbres de la Seamy. N’importe quoi pouvait arriver à n’importe qui, et bien sûr que la vie d’Aria était en danger quotidiennement. C’était une crainte justifiée.

Mais avait-elle peur ?
Peut-être.

De quoi ?
Du pouvoir que détiendraient les Hunters sur elle s’ils décidaient de mettre la main sur sa sœur. De la perspective angoissante de la condamner à une existence sordide dans la zone en quarantaine.

Mais Eryn n’avait pas peur qu’Aria perdît la vie aux mains de Drake Carter. Non. Pour commencer, sa sœur était une Blake. Et si elles n’avaient jamais été proches, elles brûlaient toutes les deux d’une détermination héritée de leur père, d’un instinct de survie ancré au plus profonds de leurs gênes. Elles ne lâcheraient pas le morceau. Pas tant que la vie de l’autre serait en jeu.
Elle n’avait pas peur pour Aria.

Cette dernière était la source de sa détermination.

Bien sûr, c’était hypocrite de sa part de raisonner de la sorte ; une partie d’elle vivait avec cette frayeur nichée dans les entrailles qui, parfois, venait hanter ses songes de son spectre sanglant.

Elle lança un dernier regard à Shura.
La jeune femme lui parut soudain bien pathétique, bien campée dans son carcan d’idéaux stériles, dépourvue de sentiments, dépourvue d’âme. Elle pensait avoir cerné les craintes d’Eryn, de frapper là où ça faisait mal, mais elle négligeait tout l’ampleur de ses actions, incapable d’imaginer combien les émotions humains pouvaient être retorses, combien la détermination liée aux sentiments pouvait s’avérer être une force plutôt qu’une faiblesse. Aurait-elle survécu toutes ces années dans les forces spéciales sans sa capacité à éprouver ? Non. Parce que si elle mettait soigneusement son éthique et ses ressentis de côté, si elle se murait derrière un masque d’impassibilité, elle n’en demeurait pas moins motivée par la dévotion qu’elle vouait à Drake, à sa carrière militaire, cette soif de justice quand bien même prenait-elle des chemins sinueux. Une forme d’affection comme Shura ne pouvait certainement pas l’imaginer.

« C’est bien pour ça que c’est Carter qui commande et pas une gamine déséquilibrée », persifla Eryn, davantage pour elle-même que comme insulte à l’adresse de ladite gamine.

Aria était en danger quoi qu’il arrivât, elle ne se voilait pas la face ; le concept était d’un ridicule affligeant.

Oui elle commettrait des erreurs.
Mais pas celles que tu crois.
Après tout, le concept d’erreur était plutôt relatif, non ?
Était-ce une erreur, de préférer la survie de sa sœur à la sienne ? Non. Eryn n’en doutait pas une seule seconde et ne reviendrait jamais sur ce genre de choix. Pour Shura, l’erreur reviendrait à la capture. Or, les objectifs d’Eryn étaient tout autres.



Elle tournait résolument le dos à Shura, sondant les alentours en quête de danger. Elle consulta une fois de plus sa montre et décida qu’il était grand temps de partir. Elle sangla son sac sur le dos, un Beretta au poing, son autre arme accessible dans son sac. Elle ne se tourna pas pour adresser ses dernières paroles ; elle les laissa flotter dans la bise hivernale, de façon presque méditative :

« Et toi, Shura, quel prix vas-tu payer ? »

Quelque part, elle se demandait vraiment.
Personne ne sortirait indemne de cette histoire, et Eryn savait que la jeune femme n’avait déjà plus rien à perdre. De quoi la zone Shutdown la dépouillerait, alors ?

Et sans même écouter les réponses d’une personne avec qui il était de toute façon impossible de raisonner, elle quitta les lieux à pas furtifs, réfléchissant à la façon dont elle allait brouiller ses traces derrière elle. Elle se décida pour au moins trois fausses pistes à laisser, une flagrante, les autres moins, pour ensuite disparaître complètement de son pas boitillant, le tout avant que les sauveurs de Shura ne pointassent leur nez.


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